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Première reconnaissance du préjudice écologique du Code de l’environnement de la Polynésie française pour une pollution par hydrocarbures

15/12/2022
Zone(s) géographique(s): 
Océan Pacifique, Polynésie française

 

Peu après son introduction dans le code civil en août 2016, une loi du pays du 5 octobre 2017 a introduit le préjudice écologique dans le code de l’environnement polynésien. Celui-ci connaît désormais une application en matière de pollution par hydrocarbures.

La définition du préjudice écologique par le code de l’environnement polynésien diffère légèrement de celle de l’article 1247 du code civil : « Le présent chapitre définit les conditions dans lesquelles est réparé le préjudice écologique résultant d’une menace ou d’une atteinte aux éléments et aux fonctions des écosystèmes ainsi qu’aux bénéfices collectifs tirés par l’homme du patrimoine de la Polynésie française. […] L’atteinte est préjudiciable lorsqu’elle est qualifiée, selon les cas, de mesurable, suffisante, quantifiable, non négligeable, notable, significative, substantielle, grave ou irréversible » (C. env. Polynésie française, art. LP. 1530-1).

En l’espèce, le 12 mai 2019, des pilotes d'avion ont signalé le rejet, par un navire de pêche battant pavillon chinois, d'eaux polluées dans les eaux territoriales de Polynésie française. Par l'analyse des clichés aériens, le Centre d'expertise des pollutions a évalué le volume d'eau polluée rejetée à la mer, avec une teneur en hydrocarbures dépassant 15 ppm, à 450 litres et la tramée de pollution à 2 miles nautiques (3,7 km) de long et 100 mètres de large. Le capitaine du navire et la société exploitante du navire ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour rejet illicite d'hydrocarbures en mer.

Les premiers juges ont déclaré les prévenus coupables, ont condamné la société à une amende de 36 millions de francs Pacifique d’amende (environ 300 000 euros), le capitaine à une amende de 300 000 francs Pacifique (environ 2500 euros) et se sont prononcés sur les intérêts civils. Ils ont toutefois débouté la Fédération des associations de préservation de l’environnement de Polynésie française (FAPE), partie civile, de sa demande de dommages-intérêts fondée sur le préjudice écologique.

Le 25 janvier 2022, par un arrêt n° 21-84.366, la Cour de cassation a cassé cet arrêt au motif que « l’indemnisation du préjudice moral personnel d’une association habilitée n’est pas exclusive d’une indemnisation du préjudice écologique » et elle a renvoyé l’affaire à la cour d’appel de Papeete.

Par un arrêt du 15 décembre 2022, la cour d’appel a condamné le capitaine et l'armateur à réparer le préjudice écologique pour la somme de 3,357 millions de francs Pacifique, soit environ 28000 euros, montant correspondant au coût de traitement d’un volume équivalent d’eau polluée. Cette méthode de calcul proposée par la partie civile n’a pas été remise en cause par la cour d’appel de Papeete qui a ainsi fixé la réparation du préjudice écologique au montant évalué par la FAPE.