Antilles françaises : suspension d’une campagne de recherche scientifique marine portant atteinte aux conditions de vie de la Baleine à bosse et du Cachalot
Le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique suspend, par une ordonnance n° 2500144 du 4 mars 2025, l’exécution de l’arrêté préfectoral du 13 janvier 2025 relatif à la conduite d’une campagne de recherche scientifique marine dans les eaux sous souveraineté française envisagée du 1er mars 2025 au 20 avril 2025.
Le 13 janvier 2025, le préfet de la Martinique, délégué du gouvernement pour l’action de l’Etat en mer aux Antilles, autorise la flotte océanographique française à conduire une campagne de recherche scientifique marine baptisée « Garanti 2 » dans les eaux sous souveraineté française, à bord du navire de l’Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) dénommé « Atalante » pour une mission envisagée du 1er mars 2025 au 20 avril 2025, au niveau des zones côtières guadeloupéennes, martiniquaises et des îles du nord.
L’association Le Toto-Bois - association pour l’étude et la protection de la vie sauvage dans les petites Antilles (AEVA), l’association pour la sauvegarde et la réhabilitation de la faune des Antilles (ASFA), l’association Sea Shepherd France et l’association Vétérinaires pour la biodiversité saisissent alors le juge des référés en vue d’obtenir la suspension de cet arrêté et d’enjoindre l’Etat à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer le respect des libertés fondamentales liées à l’environnement et à réévaluer les conséquences environnementales.
Le juge relève que la campagne de recherche, qui a pour but d’acquérir des profils sismiques de haute résolution, prévoit l’utilisation de différents systèmes entrainant une intensité sonore sur un spectre de fréquences très important. Or, précisément, « les mois de mars et avril correspondent à la période de migration, de reproduction et de mise bas de la baleine à bosse (Megaptera novaeangliae) et du cachalot (Physeter macrocephalus), qui figurent sur la liste rouge des espaces menacées en France. Ils font également partie des espèces protégées ». De plus, les engins dits « impulsionnels » que les chercheurs entendaient utiliser peuvent déclencher « des réactions comportementales chez les cétacés, notamment du stress, une fuite, des changements migratoires, une interruption de l’activité en cours, des modifications du profil de plongée et du rythme respiratoire, une rupture de la relation mère/enfant, un masquage des émissions nécessaires pour leur communication ou leur perception de l’environnement, mais aussi des lésions physiologiques graves telles que des douleurs, une perte de l’audition temporaire ou permanente, des lésions des organes de l’audition mais aussi d’autres organes, qui peuvent être létales. »
Dans ces conditions, le juge des référés retient qu’il n’est « fait état d’aucune urgence ou nécessité particulière », à ce que la campagne de recherche se déroule précisément pendant la période critique de migration, de reproduction et de mise à bas de la Baleine à bosse et du Cachalot. Aussi l’arrêté, qui « est de nature à générer des effets néfastes et irréversibles sur l’équilibre et la conservation de ces espèces protégées » porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, tel que proclamé par l’article premier de la Charte de l’environnement. Le juge des référés en suspend donc l’exécution.